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Le domaine Térahertz (THz) se situe à la croisée des mondes de la photonique et de l’électronique. Les ondes THz se caractérisent par une fréquence comprise entre 100 GHz et 10 THz, correspondant à la fréquence des modes propres de vibration de nombreuses molécules, une longueur d’onde comprise entre 30µm et 3mm qui leur confère un fort pouvoir pénétrant, et une faible énergie (0,4 à 4 meV) les rendant totalement inoffensifs, notamment pour le vivant. Par ailleurs, un grand nombre de matériaux sont transparents au rayonnement THz, aussi appelé rayons T. En revanche, ces derniers sont réfléchis par les métaux et absorbés par les liquides polaires, dont l’eau. De ces propriétés spécifiques découlent un grand nombre d’applications de la spectroscopie THz et de l’imagerie THz dans des domaines aussi variés que la cosmologie, le contrôle non-destructif, la sécurité, l’étude patrimoniale…
Mais la spectroscopie THz permet également de sonder un grand nombre de phénomènes physiques fondamentaux dans la matière condensée et dans la matière vivante. En effet, l’énergie des ondes THz correspond à celle de nombreuses excitations élémentaires, telles que les plasmons, les magnons, les phonons, les transitions inter-niveaux de Landau et les résonances de spins électroniques.
L’activité de la plateforme TOP regroupe à la fois des recherches fondamentales basées sur des techniques de spectroscopie THz mais aussi des recherches orientées vers le développement de nouveaux capteurs et émetteurs, et des recherches plus appliquées, couplant l’imagerie et la spectroscopie THz à l’agronomie, par exemple.
L’activité de recherche THz sur le site de Montpellier a débuté en 1983 avec la publication d’un article théorique de M. Dyakonov [1], professeur à l’Université. En 2002, W. Knap a mis en évidence la première détection de rayonnement THz par un nanotransistor [2]. L’équipe composée de F. Teppe, N. Dyakonova, D. Coquillat et W. Knap a donc développé cette activité sur le site de 2003 à 2013. Suite au dépôt de plusieurs brevets reliés au développement et à l’intégrations de sources et de détecteurs THz, la start-up T-Waves Technologies, devenue depuis Terakalis, a été créée en 2013. Terakalis développe ainsi des systèmes de contrôle non-destructifs de matériaux industriels, basés sur des imageurs THz issus des brevets de l’équipe.
En parallèle, l’Institut d’Electronique et des Systèmes (IES UMR 5214) a lancé en 2001 [3] une activité de simulation des phénomènes physiques dans les composants électroniques dans le domaine fréquentiel THz. Le développement d’une activité expérimentale à l’IES portée, initialement par L. Chusseau et J. Torres, a permis de rapprocher les deux laboratoires, notamment par la création d’un Groupement d’Intérêt Scientifique « TeraLab » en 2010. Avec le soutien du CNRS, de l’université de Montpellier et de la région Occitanie ; et dans un esprit fédérateur et structurant du pôle régional ; la plateforme Térahertz d’Occitanie (Terahertz Occitanie Platform – TOP), à l’interface entre le L2C et l’IES, a été créé en 2017.
Depuis 2012, de nouvelles activités de recherche se développent dans le cadre de la plateforme TOP. En physique du solide, un système de magnéto-spectroscopie permettant de sonder la structure de bandes de matériaux topologiques et de Dirac a été développé par S. Ruffenach et F. Teppe [5]. Plus récemment, un système unique en Europe de spectroscopie Landau, développé en 1993 par W. Knap, a été remis en marche par C. Consejo et F. Teppe pour étudier l’émission cyclotron de matériaux de Dirac [6, 7]. Et dernièrement, un système de spectroscopie par magnéto-photoconductivité THz a été développé par C. Bray, C. Consejo, K. Maussang et F. Teppe [8] pour étudier les résonances de spins électroniques dans les matériaux bidimensionnels comme le graphène par exemple. En biophysique, S. Ruffenach, L. Varani et J. Torres développent des systèmes de spectroscopie THz de champ proche pour étudier les interactions électrodynamiques quantiques entre protéines [9]. Enfin, C. Bray, N. Diakonova et D. Coquillat ont développé un système d’imagerie pour étudier les plantes [10].
Tous ces outils, émetteurs, détecteurs et spectromètres ont été mis en commun lors de la création de la plateforme Térahertz d’Occitanie (Terahertz Occitanie Platform – TOP).
[1] M. Dyakonov et M. Shur, Phys. Rev. Lett. 71, 2465 (1993).
[2] W. Knap et autres, Appl. Phys. Lett. 81, 4637 (2002).
[3] E. Starikov et al. J. Appl. Phys. 89, 1161 (2001).
[4] V. Gruzinskis et autres, Phys. Stat. Sol. (b) 204, 77 (1997).
[5] F. Teppe et al. Nature Communications 7, 12576 (2016).
[6] D. But et al., Nature Photonics 13, 783–787 (2019).
[7] S. Gebert, C. Consejo et al., Nature Photonics 17, 244–249 (2023).
[8] C. Bray, K. Maussang et al., Phys. Rev. B 106, 245141 (2022).
[9] M. Lechelon, et al., Science Adv. 8(7): eabl5855 (2022)
[10] Y. Abautret, et al., OPTICS EXPRESS 28, 35018-35037 (2020).